Géolocalisation : une gestation législative douloureuse
Ce projet de loi autorisant l’utilisation judiciaire des données de géolocalisation en temps réeel a initialement été présenté en Conseil des ministres par Madame Taubira, Garde des Sceaux, le 23 décembre 2013, aux fins de conformité légale avec la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH).
A l’unanimité, sauf les membres du groupe EELV, le Sénat a adopté le projet de loi, non sans l’avoir préalablement amendé, en vue de « l’adoucir », conformément aux prescriptions de la CNIL. Ainsi, les élus du Palais du Luxembourg ont réduit l’accès à ce mode opératoire pour les délits dont la peine d’emprisonnement encourue est supérieure à 5 ans (au lieu de 3 ans dans le texte initial) et l’ont soumis à autorisation du juge des libertés et de la détention (JLD) sous 8 jours (au lieu de 15 jours dans le texte initial). Le Procureur doit en tout état de cause, autoriser en amont l’usage de la géolocalisation, avant que le JLD ne soit saisi postérieurement.
La Commission des Lois de l’Assemblée Nationale, présidée par le député Jean-Jacques URVOAS, est revenu à un « durcissement » du texte, en reprenant sa version d’origine, votée le 28 janvier 2014.
Renvoyé en Commission Mixte Paritaire, le texte a alors fait l’objet d’un arbitrage parlementaire entre les 2 chambres, donnant lieu à l’introduction dans le Code pénal d’un article 230-32, définitivement adopté le 24 février 2014.
Cette disposition prévoit une autorisation préalable du procureur (sauf cas d’urgence où le procureur doit valider a posteriori la mesure dans les 24 heures).
En cas de son prolongement au-delà de 15 jours, la géolocalisation doit être autorisée par le JLD.
Une telle mesure ne peut être mise en œuvre que pour des délits dont la peine d’emprisonnement prévue par les textes est supérieure à 5 ans, s’agissant des atteintes aux biens, et de 3 ans, s’agissant des atteintes aux personnes.
Pierre-Olivier SUR, au nom du Barreau de Paris, s’est ému de l’adoption de ce texte qui a été déféré devant le Conseil constitutionnel. Cette institution a globalement validé le principe, sauf à émettre des réserves faisant valoir que la personne mise en cause « à l’insu de son plein gré » puisse introduire un recours quant au moyen de recueil de preuves obtenues conte lui par ce procédé.